Assemblée nationale

Réforme de la SNCF : les droites s'unissent pour brader le service public ferroviaire

Par Loïc Prud'homme 14 juin 2018

En enclenchant la procédure accélérée pour mieux contourner le Parlement, le Gouvernement espérait faire passer rapidement la réforme de la SNCF et son ouverture à la concurrence. Nous voici quelques mois de débats plus tard, avec un mouvement social de cheminots sans précédent et une majorité de français qui ne voit toujours pas bien l’intérêt de cette réforme, et on peut les comprendre.

La situation pourrait prêter à sourire si elle n’était pas si affligeante.

Car entre temps les portes-flingues de Macron ont accumulé tout le mépris possible envers les cheminots : chantage à la dette, menace de privatisation, tentatives de décrédibilisation du mouvement et annonce de la filialisation de fret SNCF.

Aujourd’hui ce mépris, est poussé à son paroxysme en présentant le retour du texte après son passage au Sénat comme une version améliorée, où les mesures sociales auraient trouvées toute leur place et où les cheminots ne pourraient qu’applaudir des deux mains en reprenant le travail.

C’est ce même mépris qui est  jeté à la face de cette Assemblée. Après avoir conclu en une heure un pacte entre LREM et LR qui scelle la fin du service public ferroviaire, le Gouvernement a demandé à l'Assemblée d’adouber le texte par un hochement de tête, sans débat ni possibilité d’amender.

Les droites savent manifestement s’entendre dès lors qu’il s’agit de vendre à la découpe le patrimoine des français au profit des entreprises privées et du lobby routier.

Mais le saupoudrage ne trompe personne.

Mme Borne  se flatte d’avoir rajouté dans le projet l’incessibilité des capitaux de la SNCF, un amendement proposé par La France Insoumise et rejeté par la majorité il  y a quelques semaines.

Nous ne connaissons que trop bien, les histoires de GDF et de France Télécom pour savoir que la privatisation reste à l'agenda, les cheminots d’ailleurs ne s’y trompent pas en restant dans leur écrasante majorité opposés au projet, et ils sont les premiers concernés.

Car dans le fond, rien n’a changé pour la SNCF, les cheminots et les usagers.

L’ouverture à la concurrence restera la règle. Les régions, menacées par la baisse des dotations, ont déjà annoncé la reprise des contrats TER par des entreprises privées. Avec à la clé l’abandon des lignes du quotidien, jugées non rentable.

Le statut des cheminots reste leur bouc émissaire préféré, responsable à lui seul de décennies d’égarement dans le tout TGV et de réformes libérales. Se priver de travailleurs du rail, compétents à même d’assurer notre sécurité, il faudra m’expliquer comment cela sauvera la SNCF.

Je ne referai pas la liste des incidents qui se sont multipliés après la privatisation du rail au Royaume-Uni ou des entorses au droit du travail qui menacent la sécurité dans les entreprises privées de fret.

Fidèle aux réformes que Mme Borne a menées lorsqu'elle était directrice de la stratégie de la SNCF, elle acte la séparation en 3 entités distinctes alors qu’une politique du rail ambitieuse demande une entreprise intégrée.

Quels sont les bénéfices d’une séparation des maisons mères sinon de faire peser le poids de la dette sur la seule SNCF Réseaux pour mieux attirer les investisseurs et vendre Mobilités à la découpe ? Car la stratégie nous la connaissons, privatisation des bénéfices et mutualisation de la dette.

La dette parlons-en, que feraient les fossoyeurs de la SNCF sans cette dette ? Elle reste leur meilleur argument pour pratiquer un chantage et un dumping social aussi cynique que mesquin. Nous demandons un audit pour savoir à qui profitent les 1,5 milliards €/ an d’intérêts. Cet aspect ne figure pas dans la réforme, sûrement un oubli dans la précipitation à brader le service public ferroviaire.

Alors que le texte a été adopté à une large majorité avec le soutien de la droite, une question cependant demeure : en quoi cette réforme fera-t-elle mieux rouler les trains ? Cette question, je l'avais adressé à la Ministre il y a 3 mois et toujours aucune réponse. Car tout ce que cette loi fera mieux rouler ce sont les cars Macron. Et tandis que ce Gouvernement persiste à rouler pour le lobby routier, nous continuerons à défendre avec fierté le travail des cheminots et notre service public ferroviaire pivot de la transition écologique et de l’aménagement du territoire.

Loïc Prud'homme est député France Insoumise de la Gironde pour les communes de Bègles, Bordeaux Sud, Talence et Villenave-d'Ornon. Résolument engagé en faveur de la règle verte et de la transition écologique de notre société il siège à l'Assemblée nationale au sein de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire. Retrouvez sur ce site internet son travail dans l'hémicycle et en circonscription en faveur des services publics, de l'emploi local, de la justice sociale et de la transition écologique.

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